The Wraith a écrit :
"La corde mordait dans le cuir des bottes et des gants de L'agent du Secret connue sous le nom de code de "La Vénitienne"
Et elle, en retour, mordait dans son bâillon.
Dehors le vent s'était levé et les nuages se préparaient à crever.
En bas dans la salle commune de l'auberge on glosait et vidait force chopines de mauvais vin et de bière bon marché.
Les hommes du Duc D'Aiguillon se laissaient aller et se vantaient de la facilité avec laquelle ils avaient capturé l'espionne des Doges.
Tapi dans l'ombre Le Wraith se surprit à laisser vagabonder un sourire sur son visage déterminé. Les sots. Il était tout de même surpris, sa compagne aurait du se manifester. A moins... Non, la chose n'était même pas imaginable, D'Aiguillon avait besoin d'elle vivante.
Il sentit pulser à son côté une onde de pure méchanceté, Indiscrète sentait le sang tout proche et réclamait son dû. Il posa la main sur la fusée de sa rapière et sentit la dent de dragon dont elle était faite vibrer sous ses doigts, impatiente. Il la sortit du fourreau et attendit. un coup de tonnerre retentit, encore lointain, le vent se leva et un éclair zébra le ciel.
La porte de l'auberge s'ouvrit et une silhouette vacillante en sortit. Un des sbires de D'Aiguillon sortait pisser. Le Wraith entendit les rires gras du reste des soudards avant que la porte ne se referme.
L'homme eut une belle mort, il s'effondra en silence la gorge transpercée de part en part et la queue à la main...
A l’intérieur, La Vénitienne cessa de se débattre dans ses liens.
Il venait la secourir. Elle le sentait. Si elle n'avait pas été bâillonnée l'éclat féroce de son sourire aurait suffi à éclairer toute la pièce ou elle était retenue captive. Elle ferma les yeux et frissonna de plaisir en entendant les premiers bruits de combat."

Plus bas, une lutte acharnée venait de s'engager. Le Wraith, après avoir occis un premier homme d'un coup d'estoc fulgurant, faisait maintenant face aux deux solides gaillards qui avaient eu le temps de dégainer leurs épées. Et à deux contre un, aussi doué fut-il, la partie ne s'engageait pas sous les meilleurs auspices.
-Lâche ton arme ! Vil freluquet ! Cracha le plus proche.
Mais l'agent des Doges ne répondit rien. En un instant, il avait étudié la situation dans les moindres détails et la pièce dans les moindres recoins. Connaître le terrain d'un combat était son maître mot. Et depuis, il attendait...
-Tu cherches ta belle amie c'est ça... Rassure-toi, elle est bien au chaud à l'étage. D'Aiguillon la veut vivante...
-Et on la lui amènera vivante ça oui... Railla l'autre. Mais pour le reste...
Le Wraith étouffa un juron. Les deux hommes jouaient avec ses nerfs pour le provoquer, pour le pousser à la faute. Il se devait de garder son sang-froid jusqu'au moment opportun.
-Si ça se trouve elle y prendra goût... Je parie que c'est une sacrée cochonne...
-Rien qu'à voir comment elle est habillée...
Soudain, la foudre s'abattit violemment, à quelques centaines de mètres à peine de l'auberge, avant que le tonnerre n'en fasse trembler les murs.
L'orage ! Voilà ce que le Wraith attendait ! C'était là sa diversion.
En un éclair il fondit sur eux telle une créature avide de sang et de chair fraiche. D'un coup de poing il poussa le premier sbire en direction d'un petit tabouret qui le fit tomber à la renverse, tandis que la pointe de sa rapière venait s'enfoncer en plein cœur de son acolyte.
-Mon épée ! Hurla la brute en gesticulant sur le sol.
Le Wraith s'approcha doucement. L'arme de son adversaire n'était qu'à quelques centimètres de sa main. Quelques centimètres pour un salut qui ne viendrait jamais...
-Aie ! Cria-t-il lorsque la botte en cuir de l'agent des Doges écrasa ses doigts avec férocité.
Dominant la scène de toute sa hauteur, l'espion porta l'extrémité de sa lame à sa gorge.
-Pitié... Supplia l'homme.
Mais malheureusement pour lui, le Wraith était dénué de toute compassion...
A l'étage, la Vénitienne trépignait d'impatience derrière son bâillon. Les bruits avaient cessé, signe que la lutte, aussi âpre fut-elle, était désormais terminée. Il ne restait plus qu'à en connaître le vainqueur...
Maudits liens !
Les hommes du Duc D'Aiguillon n'étaient que de sombres mercenaires, mais elle devait leur reconnaître au moins ce mérite. Impossible de s'échapper.
-Mmmh !!! Gémit-elle en entend des bruits de pas dans le couloir.
L'instant suivant, la porte de la chambre dans laquelle elle était retenue prisonnière s'ouvrit avec fracas sur son partenaire.
-Alors ma chère ? Qu'est ce que tu ne ferais pas sans moi ?
Très drôle !
-Mmmh...
-Allons allons... Je vais te retirer ça. Dit-il en se penchant vers elle.
-Rha... C'est mieux ! Répondit-elle une fois son bâillon ôté.
-Qu'est ce qu'on dit ?
-Merci.
-Bien...
En quelques secondes, le Wraith trancha les cordes qui entravaient la Vénitienne.
-Nous devons partir d'ici tout de suite. Expliqua la jeune femme. Nos renseignements étaient faux.
-Je m'en suis un peu douté... Ricana l'espion.
Aussitôt, les deux complices dévalèrent les marches de l'escalier et sortirent de la sinistre auberge. Dehors, une violente pluie d'orage venait d'éclater et couvrait de son vacarme l'écho d'une nuée d'hommes en armes se dirigeant vers eux.
-Vite ! Hurla la Vénitienne en courant vers les canaux de la cité des Doges.
-Par là ! Cria le Wraith en désignant une petite gondole. C'est notre seule chance.
Moins d'une dizaine de minutes plus tard ils étaient sur l'autre rive, hors d'atteinte des soldats du Duc D'Aiguillon qui ne pouvaient que gesticuler au loin. Car jamais, ô grand jamais, ces derniers n'auraient osé les suivre là où ils allaient...
Désormais sains et saufs, ils pénétrèrent par une petite entrée, connue seule des agents du Secret, dans les souterrains du palais des Doges. Là, au plus profond des oubliettes du château, ils se rendirent dans une vaste cellule au milieu de laquelle, immobile, trônait un solide chevalet. D'un geste, le Wraith fit signe à la Vénitienne d'avancer vers l'homme qui y était attaché.
-Surpris de me voir Paolo ? Demanda-t-elle en arrachant la cagoule en cuir qui recouvrait le visage du prisonnier.
-Je... Je... Balbutia ce dernier encore désorienté.
-Je suis tombée dans un piège par ta faute, et sans mon partenaire, Dieu seul sait où je serais à l'heure actuelle... Continua-t-elle tout en resserrant une à une les sangles qui entravaient l'homme.
-Je... J'ignore de quoi vous voulez parler. Protesta-t-il, terrorisé.
-Tu nous as menti Paolo. Et on ne ment pas au Secret sans en subir les conséquences...
La jeune femme se tourna alors vers le Wraith pour lui donner un rapide signe de tête. Un ordre que ce dernier attendait avec impatience depuis de longues minutes...
-Aaaah ! Hurla aussitôt de douleur l'infortuné lorsque ses membres furent irrésistiblement entraînés par une poulie vers les quatre coins du chevalet.
-Alors ?
-Pitié ! Je ne sais rien de plus... Aaaah !
-Alors ?
-D'Aiguillon m'a trompé, autant que vous... Aaah... Il devait savoir que je vous parlerai, c'est pour ça qu'il m'a parlé de l'auberge... Je vous en supplie... Aaah...
L'homme qui avait été un jour l'un de leurs plus farouches ennemis n'était plus qu'un vulgaire amas de chairs et d'os désarticulés, le reste de ses muscles tendus à l'extrême.
-Cela veut dire que tu ne nous est plus d'aucune utilité Paolo... Annonça la Vénitienne d'une voix implacable avant de faire signe au Wraith d'en finir.
-Pitié non !
L'agent des Doges tourna un peu plus la roue du mécanisme diabolique qui écartelait leur prisonnier. L'instant suivant, ses membres se disloquèrent dans un fracas épouvantable et d'innombrables flots de sang commencèrent à jaillir de ses plaies pour venir éclabousser sa partenaire.
-Tu es si belle. Lui dit-il alors qu'un éclair lubrique illuminait son visage.
-Viens... Murmura-t-elle en détachant lentement les lanières de son corset. Viens t'abreuver de ce délicieux nectar qui recouvre à présent mon corps.
Le Wraith s'approcha pour venir poser sa langue entre les cuisses de sa compagne afin de goûter, de déguster, le sang encore chaud de Paolo qui perlait à présent sur sa peau nue.
-Oh oui... Gémit-elle tout en portant à sa bouche ses doigts imprégnés de ce fluide au parfum métallique et délicat. C'est si bon...
-Un vrai régal. Répondit le Wraith en arrachant le reste de ses vêtements avec fougue.
-Prends-moi maintenant ! Ordonna la Vénitienne. Prends-moi là, au milieu de ce torrent de vie. Je...
Mais elle ne put en dire davantage. Les lèvres de son compagnon venaient de sceller ses lèvres d'un baiser aussi sensuel que sanguinolent. Le Secret des Doges était bien gardé.