Le voyage de Solange, Chapitres 1 - 3
Publié : 07 oct. 2015, 13:50
La façade de l'église ne manquait pas de charme. Je traversai la rue et trouvai un point de vue suffisamment éloigné pour que mon objectif ne coupe pas le cloché. Une fois la photo prise, je mis mon appareil en bandoulière et me dirigeai vers ma voiture. L'église sonna dix-neuf heures. Je me dis qu'il était temps d'accélérer le pas. J'avais cent cinquante kilomètres de route devant moi, et je n'aime pas rouler de nuit, surtout sur les routes sinueuses de campagne. Cela faisait maintenant deux semaines que j'avais passé mon dernier examen de l'année et que j'avais entrepris de traverser les Etats-Unis d'est en ouest pendant les vacances estivales. Quitter la France pour venir étudier de l'autre côté de l'Atlantique est une bien bonne chose, mais partir à la découverte de mon pays hôte avant la nouvelle année était bien plus excitant, quoique peu commun pour une jeune fille seule.
Je déposai mon sac à dos sur le siège passager, et fis le tour de la voiture pour m'installer. J'allais démarrer lorsque je vis une femme d'un certain âge accroupie sur le trottoir à une vingtaine de mètres. Elle semblait chercher quelque chose sur la chaussée tout en parlant à voix basse. Je la rejoignis et lui demandai si elle avait besoin d'aide. Elle me dit qu'elle avait perdu une de ses bagues, qu'elle était convaincue de l'avoir à son doigt lorsqu'elle était sortie de l'église, mais qu'elle avait dû la perdre en chemin. Apparemment, je roulerai de nuit! Nous commençâmes à passer le trottoir et la route au peigne fin. La femme se confondait en remerciements. Finalement, après plus d'une demi-heure de recherches, je trouvai la bague bien cachée sous un arbre.
- La voici, Madame!
La femme multiplia les remerciements, et s'en suivirent les questions rituelles: d'où je venais, ce que j'étudiais et ce que je faisais en cette fin d'après-midi dans une petite ville isolée de Pennsylvanie. Elle me dit qu'elle et son mari avaient travaillé en France pendant plus de dix ans avant qu'il ne décède il y a deux ans, et qu'elle adorerait parler français avec moi plus longtemps et faire plus ample connaissance. Je lui expliquai que j'avais réservé une chambre de motel à environ cent miles d'ici, et qu'il fallait mieux que je me mette en route. Mais elle insista en me disant qu'elle se ferait une joie de m'héberger pour la nuit. Elle ajouta qu'elle ne faisait pas confiance au premier venu, mais que j'avais tout l'air d'être une fille sérieuse et polie. Je dois bien avouer qu'elle avait raison; on m'a d'ailleurs souvent taquiné pour ma politesse quelque peu désuète.
- Suivez-moi, je roulerai lentement. J'habite à quinze minutes d'ici.
- Bien madame.
Après avoir traversé le village, nous nous enfilâmes sur une petite route qui ondulait entre les collines bercées par le soleil couchant. Après plusieurs bifurcations qui me firent perdre mon sens de l'orientation, nous arrivâmes devant une grande et belle maison de brique rouge entourée d'un jardin méticuleusement entretenu orné de buissons fleuris. Je garai la voiture dans l'allée et rejoignis mon hôte.
- Vous avez une bien jolie maison, Madame!
- Oh vous savez, entretenir le gazon n'est pas bien difficile. La tenue de l'intérieur laisse à désirer. A part ça, je ne vous ai pas encore demandé votre prénom?
- Je m'appelle Solange.
- Vous avez un beau prénom! Je m'appelle Mary. Rien de bien original par ici!
Nous pénétrâmes à l'intérieur de la maison. Mary faisait preuve de fausse modestie. La maison était dans un état impeccable. Après un petit tour du propriétaire, Mary me montra la chambre. La chambre d'ami, dit-elle; une jolie pièce au plancher craquant, décorée de quelques copies de tableaux célèbres et d'objets religieux.
- J'espère que vous dormirez confortablement, Solange.
- J'en suis sûre Madame, merci beaucoup.
Je m'attendais à ce que tôt ou tard, Mary me demandât de l'appeler par son prénom. Mais il n'en fut rien. Elle semblait d'ailleurs apprécier mes formules de politesse. Du haut de ses cinquante-cinq ans, Mary dégageait d'ailleurs une assurance tranquille doublée d'une certaine autorité. Ses cheveux bruns arrangés en chignon et son mince tailleur sombre lui donnaient même un air un peu sévère.
Je rejoignis Mary dans la cuisine une demi-heure plus tard après m'être débarbouillée et reposée quelques instants. Je ne vais pas vous faire le récit de notre conversation qui somme toute ne sortit pas de l'ordinaire. Jusqu'au moment fatidique où machinalement pendant le repas, je passai ma main droite dans le col de mon t-shirt pour effleurer du bout de mes doigts une tache rouge sur la peau de mon torse qui n'avait cessé de s'étendre depuis le début de mon voyage. Un résidu de stress académique sans doute. Mary fronça le sourcil.
- Qu'avez-vous Solange? Je ne voudrais pas me montrer indiscrète mais vous devriez soigner ça.
- Je sais Madame, je m'en charge. Difficile de résister à la tentation d'y toucher malheureusement, surtout la nuit.
- Je comprends. Mais si vous ne souhaitez pas consulter un médecin pour qu'il vous prescrive une formule plus efficace, il vaudrait mieux que vous dormiez avec les mains attachées!
Sa remarque me fit rire, et je rajoutai sur le ton de la plaisanterie:
- C'est bien la première fois qu'on me propose un tel traitement en tout cas!
- Je suis très sérieuse Solange.
Puis nous changeâmes de discussion, et j'oubliai l'incident.
Quelques heures plus tard, j'étais confortablement allongée sous mon édredon quand on frappa à la porte. Mary entra.
- Solange, vous dormez déjà?
- Non Madame, mais cela ne va pas tarder.
- Mais vous ne portez rien, ni pyjama ni chemise de nuit?
- Non Madame, répondis-je un peu étonnée.
- Mais comment voulez-vous ne pas être tentée par votre irritation sur le torse? Soyez raisonnable! Je vais vous chercher une chemise de nuit.
J'appréciai le niveau de préoccupation de mon hôte à mon égard, mais je dois dire que cette intrusion nocturne me surprenait. Mary revint quelques instants plus tard avec un sac, et en sortit une chemise de nuit rose pâle.
- Désolée Solange, elle doit bien avoir votre âge, mais c'est tout ce que j'ai trouvé à votre taille avec des boutons jusqu'au haut du cou. Enfilez-la, et boutonnez bien jusqu'en haut.
Mary me donna dos.
- Dites-moi lorsque vous êtes prête que je puisse me retourner.
Je m'assis au bord du lit, et enfilai la chemise de nuit.
- Voilà Madame.
- Eh bien c'est déjà beaucoup mieux! Maintenant levez-vous quelques instants, je vais vous lier les mains derrière le dos.
Je demeurai assise dans le lit et regardai Mary d'un air figé. Elle ne plaisantait donc pas tout à l'heure. Mais quelle idée saugrenue! Mary sortit du sac une corde de chanvre, ce qui me fit tressaillir.
- Allons, ne faites pas l'enfant, levez-vous et donnez-moi dos.
J'aurais sans doute dû lui dire non, faire mes valises et quitter les lieux, mais l'attitude à la fois douce, maternelle et autoritaire de Mary exerçait sur moi une fascination difficilement descriptible. Je me levai silencieusement, fis face au lit, et ramenai lentement mes mains derrière mon dos.
- Eh bien vous voyez, ce n'était pas difficile. Ne bougez pas.
Mary saisit mes poignets, les croisa, et je sentis la corde de chanvre les enserrer à plusieurs reprises jusqu'à la secousse du dernier noeud.
- Vous voilà prête! Pas trop serré?
Je murmurai un "Non Madame" peu audible.
- Allongez-vous, je vais vous recouvrir.
Je m'exécutai avec difficulté. Mary s'y connaissait. Impossible de me libérer dans un futur proche. La position n'était toutefois pas trop inconfortable, du moins pour l'instant.
- Madame, et si je dois me rendre aux cabinets pendant la nuit?
- Vous n'aurez qu'à m'appeler. Je dors dans la chambre juste à côté et j'ai le sommeil léger! Allez, tachez de vous endormir rapidement, ce n'est pas si terrible vous verrez. Bonne nuit!
- D'accord, bonne nuit à vous aussi Madame.
Je déposai mon sac à dos sur le siège passager, et fis le tour de la voiture pour m'installer. J'allais démarrer lorsque je vis une femme d'un certain âge accroupie sur le trottoir à une vingtaine de mètres. Elle semblait chercher quelque chose sur la chaussée tout en parlant à voix basse. Je la rejoignis et lui demandai si elle avait besoin d'aide. Elle me dit qu'elle avait perdu une de ses bagues, qu'elle était convaincue de l'avoir à son doigt lorsqu'elle était sortie de l'église, mais qu'elle avait dû la perdre en chemin. Apparemment, je roulerai de nuit! Nous commençâmes à passer le trottoir et la route au peigne fin. La femme se confondait en remerciements. Finalement, après plus d'une demi-heure de recherches, je trouvai la bague bien cachée sous un arbre.
- La voici, Madame!
La femme multiplia les remerciements, et s'en suivirent les questions rituelles: d'où je venais, ce que j'étudiais et ce que je faisais en cette fin d'après-midi dans une petite ville isolée de Pennsylvanie. Elle me dit qu'elle et son mari avaient travaillé en France pendant plus de dix ans avant qu'il ne décède il y a deux ans, et qu'elle adorerait parler français avec moi plus longtemps et faire plus ample connaissance. Je lui expliquai que j'avais réservé une chambre de motel à environ cent miles d'ici, et qu'il fallait mieux que je me mette en route. Mais elle insista en me disant qu'elle se ferait une joie de m'héberger pour la nuit. Elle ajouta qu'elle ne faisait pas confiance au premier venu, mais que j'avais tout l'air d'être une fille sérieuse et polie. Je dois bien avouer qu'elle avait raison; on m'a d'ailleurs souvent taquiné pour ma politesse quelque peu désuète.
- Suivez-moi, je roulerai lentement. J'habite à quinze minutes d'ici.
- Bien madame.
Après avoir traversé le village, nous nous enfilâmes sur une petite route qui ondulait entre les collines bercées par le soleil couchant. Après plusieurs bifurcations qui me firent perdre mon sens de l'orientation, nous arrivâmes devant une grande et belle maison de brique rouge entourée d'un jardin méticuleusement entretenu orné de buissons fleuris. Je garai la voiture dans l'allée et rejoignis mon hôte.
- Vous avez une bien jolie maison, Madame!
- Oh vous savez, entretenir le gazon n'est pas bien difficile. La tenue de l'intérieur laisse à désirer. A part ça, je ne vous ai pas encore demandé votre prénom?
- Je m'appelle Solange.
- Vous avez un beau prénom! Je m'appelle Mary. Rien de bien original par ici!
Nous pénétrâmes à l'intérieur de la maison. Mary faisait preuve de fausse modestie. La maison était dans un état impeccable. Après un petit tour du propriétaire, Mary me montra la chambre. La chambre d'ami, dit-elle; une jolie pièce au plancher craquant, décorée de quelques copies de tableaux célèbres et d'objets religieux.
- J'espère que vous dormirez confortablement, Solange.
- J'en suis sûre Madame, merci beaucoup.
Je m'attendais à ce que tôt ou tard, Mary me demandât de l'appeler par son prénom. Mais il n'en fut rien. Elle semblait d'ailleurs apprécier mes formules de politesse. Du haut de ses cinquante-cinq ans, Mary dégageait d'ailleurs une assurance tranquille doublée d'une certaine autorité. Ses cheveux bruns arrangés en chignon et son mince tailleur sombre lui donnaient même un air un peu sévère.
Je rejoignis Mary dans la cuisine une demi-heure plus tard après m'être débarbouillée et reposée quelques instants. Je ne vais pas vous faire le récit de notre conversation qui somme toute ne sortit pas de l'ordinaire. Jusqu'au moment fatidique où machinalement pendant le repas, je passai ma main droite dans le col de mon t-shirt pour effleurer du bout de mes doigts une tache rouge sur la peau de mon torse qui n'avait cessé de s'étendre depuis le début de mon voyage. Un résidu de stress académique sans doute. Mary fronça le sourcil.
- Qu'avez-vous Solange? Je ne voudrais pas me montrer indiscrète mais vous devriez soigner ça.
- Je sais Madame, je m'en charge. Difficile de résister à la tentation d'y toucher malheureusement, surtout la nuit.
- Je comprends. Mais si vous ne souhaitez pas consulter un médecin pour qu'il vous prescrive une formule plus efficace, il vaudrait mieux que vous dormiez avec les mains attachées!
Sa remarque me fit rire, et je rajoutai sur le ton de la plaisanterie:
- C'est bien la première fois qu'on me propose un tel traitement en tout cas!
- Je suis très sérieuse Solange.
Puis nous changeâmes de discussion, et j'oubliai l'incident.
Quelques heures plus tard, j'étais confortablement allongée sous mon édredon quand on frappa à la porte. Mary entra.
- Solange, vous dormez déjà?
- Non Madame, mais cela ne va pas tarder.
- Mais vous ne portez rien, ni pyjama ni chemise de nuit?
- Non Madame, répondis-je un peu étonnée.
- Mais comment voulez-vous ne pas être tentée par votre irritation sur le torse? Soyez raisonnable! Je vais vous chercher une chemise de nuit.
J'appréciai le niveau de préoccupation de mon hôte à mon égard, mais je dois dire que cette intrusion nocturne me surprenait. Mary revint quelques instants plus tard avec un sac, et en sortit une chemise de nuit rose pâle.
- Désolée Solange, elle doit bien avoir votre âge, mais c'est tout ce que j'ai trouvé à votre taille avec des boutons jusqu'au haut du cou. Enfilez-la, et boutonnez bien jusqu'en haut.
Mary me donna dos.
- Dites-moi lorsque vous êtes prête que je puisse me retourner.
Je m'assis au bord du lit, et enfilai la chemise de nuit.
- Voilà Madame.
- Eh bien c'est déjà beaucoup mieux! Maintenant levez-vous quelques instants, je vais vous lier les mains derrière le dos.
Je demeurai assise dans le lit et regardai Mary d'un air figé. Elle ne plaisantait donc pas tout à l'heure. Mais quelle idée saugrenue! Mary sortit du sac une corde de chanvre, ce qui me fit tressaillir.
- Allons, ne faites pas l'enfant, levez-vous et donnez-moi dos.
J'aurais sans doute dû lui dire non, faire mes valises et quitter les lieux, mais l'attitude à la fois douce, maternelle et autoritaire de Mary exerçait sur moi une fascination difficilement descriptible. Je me levai silencieusement, fis face au lit, et ramenai lentement mes mains derrière mon dos.
- Eh bien vous voyez, ce n'était pas difficile. Ne bougez pas.
Mary saisit mes poignets, les croisa, et je sentis la corde de chanvre les enserrer à plusieurs reprises jusqu'à la secousse du dernier noeud.
- Vous voilà prête! Pas trop serré?
Je murmurai un "Non Madame" peu audible.
- Allongez-vous, je vais vous recouvrir.
Je m'exécutai avec difficulté. Mary s'y connaissait. Impossible de me libérer dans un futur proche. La position n'était toutefois pas trop inconfortable, du moins pour l'instant.
- Madame, et si je dois me rendre aux cabinets pendant la nuit?
- Vous n'aurez qu'à m'appeler. Je dors dans la chambre juste à côté et j'ai le sommeil léger! Allez, tachez de vous endormir rapidement, ce n'est pas si terrible vous verrez. Bonne nuit!
- D'accord, bonne nuit à vous aussi Madame.